Quand j'entends Nina Simone
Mon coeur se fend
Se fendille
Se lézarde
Se craquelle
Mon être
Résonnent des cordes
Que j'ignorais
Mon être sensible
Ma peau
Mon coeur
Ma tristesse à fleurs
Je pourrais pleurer si je voulais
Des jours entiers
Des tonneaux de larmes d'ivrognes
Des voix cuites
Par les nuits froides
Et les déambulations
Le trop-plein de larmes
A évacuer
Le désir d'être seul
Le désir d'être ensemble
La peur d'être ensemble
La peur d'être seul
La peur d'être
La peur
Peur
Les mots sont des ignorants
Leur savoir est infini
Nous croyons les choisir
Des flammes
Qui s'éteignent à peine prononcés
Nous sommes des ignorants
Les mots sont un vieux peuple
Aux coutumes étranges
Nos pouvoirs sont ridicules
Nous pensons être puissants pourtant
Les mots n'expriment
Que leur incapacité à dire
Les mots ne parlent pas
Les mots ne résonnent pas
Les mots sont des coques vides
Que notre désir réanime
Des tonneaux de larmes
Des tonneaux de bière
Des tonneaux de pluie
De longues attentes
De la patience à revendre
Sous quel format ?
Des envies, des désirs,
De la volonté
L'envie de se libérer
De cette putain de tristesse
Et pourtant
Il faut pleurer
La mort, la tristesse, l'absence
Et pourtant
La vie, la musique, l'amour
la tendresse, le geste, la main
La tristesse ne vaut rien
Des copeaux de larmes
Des cendres
Ma soeur est présente
Je l'oublie parfois
Personnage étrange
Vieille connaissance
Bel et bien disparue
Et là pourtant, si présente
- moi qui essaye d'être là -
comme une obsession
Etre là
Tout en étant ailleurs
Je voudrais t'embrasser
Je voudrais t'aimer
Je voudrais comprendre
Je voudrais me passer
De ce goût pour l'absence
De cette habitude
Les absents ont toujours tort
Paraît-il
Dans mon cas les absents règnent
Régentent
Le creux marque
Les absents s'expriment
En creux
Ta vie comme un arbre vide
Une écorce, quelques racines
Tu tiens debout, tu parais vivant
On pourrait s'y tromper, tu leurres ton monde
A bien y regarder
Pourtant
A bien y regarder
A bien t'écouter - Maloya vieux blues
On entend la tristesse des vagues
On entend un murmure
Par-delà tes mots des fantômes parlent
Il faut faire attention - on pourrait
ne pas les entendre
A bien te regarder - Maloya rythme
Se dégage une musiqe
Qui ne t'appartient pas
Elle parle par ton corps, par ta voix
par tes yeux, par tes mains
Elle parle de ceux qui ne sont plus là
Elle parle de ceux qui vont partir
De ceux qui sont partis
Elle ne parle que d'absence
De tristesse, ce rythme lancinant
Cette ambiance de galère
Avançons avançons avançons
Qui est vivant dans cette histoire
Je te le demande
Qui est vivant ?
Toi ? Tu y crois vraiment
Toi qui t'agites vainement
Vain ?
En vain ?
Dans beaucoup de sociétés archaïques
Maloya mosaïque
Certains "hommes" - sorciers - guérisseurs
Sont des passeurs entre les mondes
Celui des vivants - du moins le disent-ils
Celui des morts
Tu peux trouver ton identité
Tu peux faire quelque chose
De cette douleur
Qui persiste
Tu peux faire quelque chose
Avec ta vie
Tu n'es pas obligé de te résigner
Tu ne parles pas que pour toi
Tu peux partager
Cette présence qui est la tienne
Ton corps, ta voix, tes mains, tes yeux
Tu le sais - rien ne t'appartiens -
Pffff ! Conneries
Désaisis toi de toi
Démets-toi de tes fonctions
Rechigne Renacle Répugne Refuse(d)
Je suis le mort-vivant
Un vivant parmi les mots - mots morts
Un mot parmi les vivants - c'est eux qui le disent
Et présent pourtant.