Après avoir longuement discuté avec moi-même, j'ai décidé d'ouvrir les commentaires à tous ! Profitez-en ! ( ou pas ).

La grande marmite


J'ai revu Blade Runner (1982) hier. Enfin la dernière partie de Blade Runner car le film est tellement lent, la musique de Vangelis tellement fatiguante, qu'il m'a fallu trois soirées pour en venir à bout.
Blade Runner, comme disait Coluche, c'est l'histoire d'un type, un Blade Runner (si, si), ancien flic devenu chasseur de prime. Il pourchasse 4 "réplicants", sortes d'humains de synthèse qui ressemblent parfaitement aux "vrais" humains et qui se sont révoltés contre leur condition d'esclaves. Sous la tutelle du plus intelligent d'entre eux, ils cherchent à faire modifier leur code génétique qui implique une durée de vie très courte ( 4 ans ).

Si j'applique le principe de plagiat par anticipation cher à l'OULIPO ( ce qui est assez drôle quand on parle de S.F.), Blade Runner est très largement coupable :

Coupable d'avoir piqué à Terminator (1984 pour le premier) l'idée de créatures de synthèse qui ressemble parfaitement aux humains.

Coupable d'avoir piqué à Luc Besson  l'idée  ( comme quoi, il en a ) de la fille du 5ème élément (1997). Entre Liv, "réplicant" chez Ridley Scott et Leeloo, héroïne de Besson ( ah, je ne savais pas ! ), la ressemblance physique est plus que frappante, même silhouette longiligne, même peau blafarde, coupe de cheveux similaire...

Leeloo dans le 5ème élément

Liv - Blade Runner

Et les voitures volantes, même topo, elles sont identiques ! De là à penser que Scott soit un admirateur passionné du cinéma de Besson et qu'il ait voulu rendre un hommage un peu appuyé au 5ème élément, il n'y a qu'un pas, que, par timidité plus que par lâcheté - on a sa fierté - nous n'oserons franchir, tant, on nous le rabâche depuis la naissance, un petit pas pour l'homme peut entraîner, sous certaines conditions de pression et de température, un grand pas pour l'humanité. Et sommes-nous prêt pour cela ?

Coupable aussi d'avoir piqué à Tim Burton et encore plus à Christopher Nolan, tous deux réalisateurs de Batman, une vision esthétique et architecturale de la ville très sombre, aussi triste qu'un frigo vide. Une ville ultra-moderne, marquée par d'immenses verticales, filmée de nuit, sous la pluie ( idée que piquera à son tour ce fieffé gredin de Fritz Lang pour son fameux Metropolis, que le succès ne fasse pas oublier que tu n'es rien qu'un sale copieur Fritz !). Au sol, la ville est dangereuse, grouillante, il existe une sorte de lumpen-proletariat, prêt à tout pour te piquer ton porte-feuille ( les parents de Bruce Wayne se font tuer de cette manière ) ou pour faucher un bidon de carburant ( ? ) sur le toit de la voiture de Rick Deckard, le Blade Runner. Bref, l'esthétique de la ville sert un discours moral : une ville inégalitaire, corrompue, viciée par son hyper-modernité ( perte d'humanité ).

La ville pour Ridley Sott. Ca rigole pas !

Petite surprise, en regardant attentivement l'image,
on voit que le nom de l'hôtel est " The Bradbury".
Plus besoin de chercher où l'écrivain de SF
Ray Bradbury a trouvé son nom d'auteur.
Un peu plus loin sur la droite,
on remarque une pancarte Nada :
"toi qui entre ici, abandonne tout espoir !"
( c'est ce qu'a dû se dire Jean Moulin... ) 

L'opposition technologie / humanité est d'ailleurs fondamentale dans Blade Runner jusqu'à la fin du film, où le "chef" des réplicants, Roy Batty, sauve le Blade Runner alors que celui-ci vient de tuer sa "compagne" Liv. Alors que les replicants sont a priori dépourvus d'empathie ( c'est là-dessus que se fonde le test qui permet de les détecter ), Roy Batty se montre un meilleur humain que le Blade Runner qui tue pour gagner sa vie. "Quite an experience to live in fear, isn't it ?" lui demande-t-il, avant de mourir en lâchant une colombe qu'il a attrappé on ne sait où et qui s'envole vers le seul coin de ciel bleu du film. Ca, je ne sais pas à qui Ridley Scott l'a piqué, mais il aurait pu éviter. M'enfin, on lui pardonne, c'était les années 80 ... et puis ça contribue à donner au film un petit côté nanar tout à fait charmant.

Rick Deckard passe beaucoup de temps dans le quartier chinois de cette ville, à commander des nouilles sous la pluie en s'abritant de son journal. Ca ne vous rappelle rien ? Un peu de musique sirupeuse par-dessus, je descends lentement un escalier et je croise une fille en robe et hop, le tour est joué, voilà In the mood for love (2000).

Des nouilles, encore des nouilles !


Ridley Scott est aussi formidablement coupable d'avoir piqué à Battlestar Galactica la présence d'Edward James Olmos. Il y avait certainement d'autres bons acteurs prêts à jouer le rôle secondaire de Gaff. Pourquoi alors prendre Adama si ce n'est par admiration pour cette extraordinaire série de SF.

Adama ! C'est où le nord ?


Autre plagiat remarquable : comme Spielberg pour son Minority Report (2002), Ridley Scott s'inspire d'un texte de Philip K. Dick, le roman Do Androids Dream of Electric Sheep? (1966). Mais Scott va plus loin. Un des moments-clefs du film Minority Report a lieu lorsque Jon Anderton ( Tom Cruise himself ) se plonge dans une baignoire remplie d'eau glacée afin d'échapper au scan rétinien que des petites araignées robots viennent faire passer à tous les occupants d'un immeuble afin de contrôler leur identité. La manoeuvre d'Anderton fonctionne, l'eau glacée fait disparaître son corps des détecteurs de chaleur, les araignées s'en vont.

Dans Blade Runner, Rick Deckard vient inspecter l'appartement où habitait un réplicant. Il fouille la salle de bain, qui ressemble beaucoup à celle de Minority Report, s'approche de la baignoire, l'inspecte aussi soigneusement que les araignées ( bon d'accord, la baignoire est vide cette fois-ci ! ) et finit par y trouver une sorte d'écaille qui lui va lui permettre de remonter jusqu'au prochain réplicant. Si ce n'est pas du plagiat, ça, je veux bien me faire curé ! En même temps, plagier Spielberg pour faire de la S.F., ce n'est pas complétement crétin, c'est un peu comme plagier Rohmer pour faire un film lent, bavard et ennuyeux ! Mais, tout de même, la politesse la plus élémentaire voudrait que tous ces grands réalisateurs, Besson le premier, aient été cités au générique. Hélas, il n'en est rien ( soupirs )!

Leprest, Brest et mes chaussettes

Je te vois !

Réveillé en pleine nuit, le moral dans les chaussettes, j'ai allumé la radio et j'ai écouté ce mec parler, sans savoir qui il est. Non seulement je l'ai écouté attentivement mais en plus ça m'a calmé. Une voix incroyable, difficile à écouter sur certaines chansons tellement elle est éraillée, mais chargée de tellement d'humanité, d'humour, et de pudeur en même temps. Allain Leprest, il s'appelle. Ah ! Le mec qui s'est suicidé cet été ! Voilà, c'est lui ( probablement pas le seul, mais lui, j'en avais entendu parler ). Eh bien, pour un gars qui va se foutre en l'air, il a vachement la patate ! (ça, c'est ma réflexion conne du milieu de la nuit, je suis toujours admiratif qui des gens qui ont le courage de se suicider et en même temps, inconsciemment, je cherche toujours le pourquoi. - Dis Tonton, pourquoi tu fais ça ? - Parce que mon petit, la vie c'est de la merde, à cause des femmes, parce que je suis ruiné, parce que j'ai honte ...). Donc à écouter Allain Leprest, j'ai entendu de l'espoir, de l'envie, de la fraternité, de l'humour aussi. Et puis Allain - avec deux ailes - parle vachement bien des chansons. Il raconte qu'il est entré à l'université comme agent d'entretien, que de fil en aiguille il s'est lié avec des profs qui lui apportaient des bouquins. Une forme d'éducation buissonnière. Et les chansons lui ont paru être le meilleur moyen pour faire le pont entre les profs et les agents d'entretien, ceux qui ne lisent guère. Sans être des tracts, les chansons peuvent faire passer des idées, des émotions... Idée qu'on retrouve chez Miossec.
Leprest parle aussi de son crabe, son animal domestique, le même que celui de Desproges, son cancer qui lui grignote l'intérieur, en rémission au moment de l'émission (2008). Même douceur dans la voix, même humour tendre lorsqu'il en parle, précisant qu'il ne s'est jamais couché, sans fanfaronnerie, chanter étant pour lui - et pour ses médecins - une partie intégrante de son traitement.
Alors voilà, le 15 août 2011, Allain Leprest est rentré au port. Merci de m'avoir repêché et accompagné au milieu de cette nuit un peu trop sombre.


Gouzi gouzi !

Pas mal de points communs entre Leprest et Miossec : même ironie douce, même humanité, même goût pour les naufrages. En commun aussi, une vraie culture politique (de gauche). Leprest, le communiste, Miossec, le ... quoi au juste ?. Il y a sûrement chez Miossec un brin de nihilisme en plus que chez Leprest, ce qui ne me déplaît pas. D'ailleurs, un vrai coco peut-il être nihiliste ?
Est-ce que j'aimerais moins Miossec si je n'étais pas Brestois ? Je ne sais pas, mais à  chaque fois que je l'écoute, c'est inratable, je me sens bêtement content de l'être ( je souris bêtement, j'ai du goëmon dans les cheveux et j'ai envie de crêpes ). 
Une interview de Miossec dans Eclectik, excellente émission sur France Inter : http://www.franceinter.fr/emission-eclectik-christophe-miossec . Ca se passe près de Brest, je suis content !

Monsieur William

C'était vraiment un employé modèle
Monsieur William
Toujours exact et toujours plein de zèle
Monsieur William
Il arriva jusqu'à la quarantaine
Sans fredaines
Sans le moindre petit drame...
Mais un beau soir du mois d'août
Il faisait si bon, il faisait si doux
Que Monsieur William s'en alla
Flâner droit
devant lui
Au hasard
et voilà ...

Monsieur William ! Vous manquez de tenue !
Qu'alliez vous fair' dans la treizième av'nue ?

Il a trouvé une fill' bien jeunette
Monsieur William
Il lui a payé un bouquet de violettes
Monsieur William
Il l'a suivie à l'hôtel de la Pègre
Mais un nègre
A voulu prendre la femme...
Monsieur William, hors de lui
Lui a donné des coups de parapluie
Si bien que l'autre, dans le noir
Lui a cou-
-pé le cou
En deux coups
de rasoirs...

Monsieur William ! Vous manquez de tenue !
Qu'alliez vous fair' dans la treizième av'nue ?

Il a senti que c'est irrémédiable
Monsieur William
Il entendit déjà crier le Diable
- Monsieur William !
Mais ce n'était que la chant monotone
D'un trombone
Chantant la peine des âmes
Un aveugle, en gémissant
Sans le savoir, a marché dans le sang
Et dans la nuit, a disparu...
C'était p't-êtr'
Le Destin
Qui marchait
Dans les rues...

Monsieur William ! Vous manquez de tenue !
Qu'alliez vous fair' dans la treizième av'nue ?


Un texte de Jean-Roger Caussimon, qui a été chanté par Serge Gainsbourg, Barbara, Les frères Jacques, Léo Férré, Bell Oeil ...
Une phrase qui me reste du film Américano de Mathieu Demy : "J'écris parce que je m'emmerde, ce que je préfère c'est la photo."
Paul Klee - Paukenspieler


Le travail de Paul Klee, dans l'ensemble, ne me touche pas vraiment, mais ça, ça !, comme dirait Elvis, je kiffe !